Les idées reçus et la réalité sur le métier de pâtissier
Reconversion en pâtisserie
Lors d’une prestation en traiteur, un monsieur avait qualifié le métier de « noble » quand je lui ai dit que j’étais pâtissière. Et c’est vrai, la profession est belle, elle a un savoir-faire français remarquable, reconnue dans le monde entier. Le pâtissier vend du rêve en donnant du plaisir visuel et surtout gustatif aux personnes. C’est un fin artisan qui maitrise les équilibres des saveurs en travaillant avec finesse.
Mais comme beaucoup d’entre vous, avant de vouloir s’engager en pâtisserie, nous avons des croyances préconçues sur ce métier. Certaines idées reçues sont justes et d’autres dépassent ce à quoi on s’attendait.
Pour commencer ce premier témoignage, je vous donne la raison de ma reconversion en pâtisserie. Puis je décrirai les évènements qui m’ont marqué pendant mes années d’apprentissages, du CAP jusqu’au BTM.
Pourquoi j’ai choisi d’être pâtissière ?
J’ai fait un Baccalauréat Littéraire et une année de cinéma avant de me réorienter vers cette voie. J’avais besoin d’un métier concret, de créer avec mes mains et tout simplement j’étais fascinée par les gâteaux. Pour moi, la pâtisserie est un métier d’artiste. Comment peut-on fabriquer des entremets à partir de farine et d’œuf ? Comment est-il possible de rendre un produit si bon et beau visuellement ? J’avais envie de connaitre tous les secrets du métier. Je me dirigeais donc vers une reconversion en pâtisserie.
Premièrement, il a fallut trouver un maitre d’apprentissage, qui n’était pas chose facile puisque j’avais déposé une dizaine de CV dans différentes pâtisseries. Mon profil ne plaisait pas, soit parce que je n’avais fait aucun stage en pâtisserie, soit parce qu’il fallait me payer un peu plus comme j’avais 18 ans à l’époque (note : la rémunération en apprentissage est un % du Smic brut en fonction de l’âge et des années d’apprentissages). Mais après quelques recherches avec l’aide du CFA, j’ai réussi à intégrer une petite entreprise, exclusivement pâtisserie (pas de boulangerie), je signais donc mon contrat de 35h.
Un saut dans le grand bain
Les horaires sont matinaux. Je pense que tout le monde en a conscience quand on commence la pâtisserie. Les journées commençaient à 5h du matin. Et une question me revenait souvent, pourquoi doit-on commencer notre journée si tôt ? Les clients n’achètent pas de tarte ou de mousse à la fraise à 6h ou 7h du matin ?
Ensuite, la journée se finissait quand le travail était terminé. Ça variait entre 13h30 à 14h, autrement dit une journée de 9h. Donc, une semaine de 45h payée 35h. J’étais consciente de l’amplitude d’horaire de travail, mais moins sur le fait que toutes les heures supplémentaires passaient à la trappe. C’était du temps travaillé gratuitement au profit du patron.
En revanche, les rares fois où je suis arrivée au travail en retard de quelques minutes, inutile de vous dire que j’ai été réprimandé !
Faire des heures supplémentaires non payées n’avait pas l’air d’ébranler les autres employés.
Et ceux qui étaient contre, quittaient l’entreprise (un seul s’était révolté et s’est ensuivit une rupture à l’amiable). Bien sûr, j’en avais discuté avec mes camarades de classes ou mon prof de pâtisserie. Tous étaient conscients de cette pratique abusive, mais personne ne s’indignait. C’est comme ça, il faut s’y faire, c’est le métier. Tu veux apprendre donc tu travailles, tu restes un peu plus.
Pour les autres années d’apprentissages, j’ai cherché une entreprise réglo sur les heures supplémentaires.

Enfin, ça a changé ! Maintenant, je remarque que de plus en plus de pâtisseries boulangeries payent les heures supplémentaires. Celles-ci sont affichés dans « gratification salariale » dans les annonces emplois. Vous comprenez le caractère exceptionnel de ces heures.
Le plus difficile pour moi a été le décalage de vie par rapport à mon entourage. Je devais faire une croix sur les célébrations avec la famille et les weekends entre amis. Les après-midi, on les passe à faire la sieste, car on est épuisé par l’heure matinale et le travail effectué (En C.A.P je ne vivais que pour le travail…).
L’image du débutant(e), jeune ou adulte en reconversion en pâtisserie
Apprenti(e) ou stagiaire en reconversion, il y a une différence entre la formation qu’on nous donne à « l’école » (CMA, CFA, GRETA, ENSP, etc …) et l’entreprise. Je préférais clairement les semaines au centre de formation où je pouvais apprendre les bases sans pression dans une ambiance solidaire. En entreprise, il faut savoir que quand vous êtes débutant(e), les premiers mois vous êtes considérés comme des « petites mains », c’est-à-dire que le chef pâtissier ne vous donnera que des tâches simples à faire comme garnir les choux, couper des fruits, napper des tartes … Ne pensez pas que vous allez réaliser un entremet de A à Z dès le début. Et c’est à vous de montrer que vous êtes motivés et que vous avez envie d’apprendre, de vous affirmer. Les employés vont vous tester pour voir vos capacités et votre motivation et en fonction ils vous donnent plus de choses intéressantes à faire.
Il y a des entreprises où les patrons ne sont pas bienveillants et vous feront faire du ménage. Je ne dis pas ces choses en l’air car j’ai eu quelques retours d’expériences de personnes.
La pression subie par l’apprenti
Durant le début du CAP, la pression était énorme. Le patron m’engueulait souvent parce que je ne travaillais pas aussi rapidement qu’il le souhaitait. Ou alors il me réprimandais car j’avais ouvert la porte du surgélateur une fois de trop. Je vous avoues qu’à plusieurs reprise je me suis demandée si j’avais pris la bonne décision de cette reconversion en pâtisserie. Beaucoup de questions se posaient ! La dextérité je l’avais acquise en travaillant avec mes parents qui sont agriculteurs. Je m’interrogeais donc si le problème était moi ? ou si c’était pareil pour les autres apprentis ? (la réponse est que ça dépend de l’entreprise, certains ont un apprentissage plus souple).
Plus tard, quand j’ai dû m’occuper de jeunes apprentis, j’ai fait attention de ne pas reproduire ce schéma et d’être plus patiente. Lors de mon examen du BTM, l’apprentie qui m’étais associée, me confia qu’elle arrêtait le métier pour un problème avec son patron et elle m’avait demandé si j’avais eu des doutes et des questionnements sur mon parcours.
Avant de débuter concrètement dans le métier, j’avais fait un stage et en discutant avec un employé, celui-ci m’avait dit que beaucoup arrêtait le métier à cause des horaires et du travail. Et je me rends compte avec des années de reculs que la moitié de mes camarades de classes ne sont plus pâtissiers actuellement.
Reconversion en pâtisserie réussie !
Ces deux premières années ont été les plus difficiles, mais elles m’ont permis de me forger et de me blinder pour les suivantes. Pour la MC et le BTM, les bases étaient déjà acquises et les entreprises un peu mieux pour les horaires et la paie. J’étais plus confiante et responsable.
Cela ne m’a pas empêché de continuer mon apprentissage et toujours travailler après. J’en suis ressortie plus expérimentée.
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